Contrairement à son nom évocateur, la pension de famille ne s’adresse pas aux familles mais aux personnes seules, à faible niveau de ressources, en situation d’isolement ou d’exclusion sociale. Il s’agit d’une résidence sociale à l’esprit familial, offrant des logements abordables dans un cadre combinant logements individuels et espaces collectifs. Des hôtes y animent la vie collective et soutiennent les occupants dans leurs démarches pour les accompagner vers les services de droit commun. Le tout, en prenant le temps. C’est la grande particularité des pensions de famille qui accueillent sans condition de durée les personnes. Ces dernières peuvent y rester en effet toute leur vie si elles le souhaitent. Elles sont là pour se reconstruire, créer ou recréer du lien. Winnie Legue, coordinatrice référente au Pôle habitat du SIAO 75, explique le sens de la démarche : « On part du principe qu’on ne peut exister sans personne. Les grands isolés n’ont plus ce lien vital pour vivre dans notre société. Il faut donc créer de l’interaction avec l’autre. Ces logements privatifs au sein d’une structure composée aussi d’espaces collectifs favorisent ces rencontres tout en créant une vie de maison ».
Le temps nécessaire à se reconstruire…
Pour être éligible à ce dispositif, il faut d’abord disposer de ressources financières (RSA, AAH, pension d’invalidité, retraite…) et d’une situation régulière et stable. Il faut aussi être autonome, capable de vivre dans un logement seul sans se mettre en danger ni mettre les autres en danger. Ici, tout est une question de stabilisation. On travaille au rythme de la personne et de ses souhaits, sans la pression liée à la sortie du dispositif. Seuls le lien et l'épanouissement de la personne importent. Winnie confirme : « Ce travail invisible produit de de magnifiques résultats. J'ai vu arriver des personnes qui ont vécu dans des tentes, des logements insalubres et qui s’allongent encore par terre, avec des attitudes propres à la rue. On leur dit : “vous êtes chez vous”. Au fur et à mesure, elles commencent à prendre possession du lieu et soin d'elle. Grâce à du temps et la mise en place d'une relation, elles se reconstruisent dans la dignité. Ce dispositif est essentiel et sauve des personnes. »
De la rue à la pension de famille…
Conçues pour des personnes isolées, les pensions de famille accueillent aujourd’hui majoritairement un public issu de centres d'hébergement. Les personnes en situation de rue, suivies par les maraudes, ont encore trop peu accès à ce dispositif malgré un profil correspondant au projet initial. Le SIAO souhaiterait ainsi que, dans l’optique de la politique du Logement d'abord et de La Rue au Logement, ces personnes puissent intégrer directement une pension de famille. Plus globalement, le SIAO 75 préconise l’ouverture de davantage de pensions de famille pour les personnes avec des ressources et des situations régulières. Un projet à forte dimension humaine avec ces pensions qui créent du lien comme une famille…
Photo : Julien Jaulin